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Aux côtés de Nadine CORNET et de Danielle SAUVAGE, ils étaient comme deux bambins égarés de la maternelle.
Patrick était plutôt fin et vif, Didier du genre rondouillard et lymphatique. Ils étaient, l’un et l’autre, de bons élèves et se suivaient de très près au classement général. Ils se situaient
toujours dans les douze premiers. Leurs bouilles de poupons, ne les mettaient pas à l’abri des paires de claques données par Mlle LACOUME.
Les rares fois où ils s’en sont pris une, on pouvait voir les yeux de Didier s’humidifier, sans verser pour autant une larme et
Patrick afficher une lippe sévère dans le bas de son visage.
A la récréation, ils ne jouaient pas au handball avec Claude, Alain, Joël et le beau gosse. Ils étaient d’humeurs tranquilles et
préféraient discuter entre camarades sous les grands platanes ou sous le préau, les jours de pluie.
Patrick n’aimait pas les sports collectifs et préférait de loin les sports individuels. Son père était professeur de boxe et notre jeune camarade
assistait aux entraînements des futurs champions tels Michel HOUDEAU ou Claude LAPINTE. Il lui arrivait de mettre des gants et de s’entraîner devant
un miroir. Au saut de corde, il était imbattable et aucune de ses camarades filles ne pouvait l’égaler en rapidité. A une séance de gymnastique, M.
ZUK demanda à Patrick d’apporter deux paires de gants de boxe pour initier les élèves à ce sport. La semaine suivante,
Patrick nous fit une démonstration de ses compétences. Gants lacés, il mimait un combat contre un adversaire invisible. Il fallait le voir
notre Patrick ! Il se protégeait la tête avec ses gants, sautait d’avant en arrière, de gauche à droite, bondissait en avant,
projetait son point et revenait à sa position de départ. Son regard était agressif et gare à l’étourdi qui passait devant.
M. ZUK l’arrête dans sa démonstration et demande au plus costaud d’entre nous d’enfiler une paire de gants. Pour vous dire la
vérité, il n’y avait pas foule au portillon. Après quelques hésitations, Jean-Yves TRICOT s’avance. Il sourit, certes, mais son sourire est
quelque peu tendu. Rien à voir avec le sourire qu’il arborait une demie heure plus tôt, lorsque son regard croisa celui de la ravissante Danielle
GERVAIS.
Gants en mains, voilà notre Jean-Yves qui s’exécute. Il se place
face à Patrick et fait de son mieux pour l’imiter. Ce n’est guère facile, ce dernier s’agite avec une telle agilité que son mouvement est
insaisissable. Jean-Yves le croit là, qu’il est déjà là-haut. Il est à gauche, non il est à droite et quel regard méchant!
Jean-Yves tente bien de lancer ses poings, mais à chaque fois c’est dans le vide le plus total alors que notre Patrick ne cesse de porter ses « petits coups » avec précision.
Quant à son jeu de jambes, c’est tout juste s’il ne s’emmêle pas les pédales. Jean-Yves est tellement gauche que chacun se met à rire, y compris M. ZUK. Devant cette pantomime
burlesque, le prof. décide d’arrêter le «combat» et de reprendre le cours normal de gymnastique où les jeux de ballon posaient moins de problèmes. Il faut reconnaître, tout de même, que
notre beau jeune homme avait eu le courage et le mérite de s’y essayer.
M. MORIZET en personne, dans ses dérives pugilistiques avec son
«acolyte de fortune», MARCHANDIN, avait fait mieux que lui.
Ce fut l’unique et dernière fois que l’on vit des gants de boxe dans l’enceinte de l’école PASTEUR. D’autres combats eurent
lieu, mais à mains nues cette fois et avec un grand désordre dans les catégories. Combien de fois a-t-on vu un poids plume en découdre avec un poids lourd ? Pour vous en avoir parlé à
maintes reprises, vous n’êtes pas sans ignorer, ni les lieux où se sont déroulés ces combats et ni les antagonistes qui s’y sont affrontés.
Patrick était une vraie balle de caoutchouc. Il avait une très grande souplesse et se pliait en deux de façon remarquable. Son front touchait ses genoux.
Malgré sa petite taille, il était un garçon très hargneux et n’hésitait pas à foncer dans plus grand et plus fort que lui. Sa technique d’attaque était amusante. Il fonçait sur l’adversaire, se
collait à lui et le poussait de toutes ses forces pour lui monter qu’il était bien là et qu’il n’avait pas l’intention de se laisser faire.
Son grand plaisir était de s’enfiler, à la récréation, les goûters que sa maman lui mettait dans son sac d’écolier. Et il en avait des bonnes choses à manger, notre Didier ! Des bananes, des oranges, des croissants, des pains aux raisins et des tablettes de chocolats. Il n’était pas égoïste et offrait parfois à un camarade une partie de son goûter. Il était sans contexte l’enfant le plus gâté de la classe. Didier n’était du genre à se remuer. La gymnastique n’était pas son fort et comme Michel BREUILLER, il préférait s’agiter les méninges devant un exercice de mathématiques plutôt que de courir derrière un ballon.
Lorsque Didier quittait l’école pour rentrer chez lui, il avait deux
possibilités : soit passer par la place de la république, soit par la passerelle avec le petit groupe habituel composé de Claude,
Christian, Michel, Anne-Marie et William. Son envie de se «bidonner» lui faisait prendre le plus souvent la seconde solution.
Dans notre classe, Patrick et Didier, de par leur
petitesse, n’avaient d’égal que deux filles inséparables, Danielle MENARD et Brigitte
LECLERC, toujours situées au premier rang et réputées pour leur talent de souffleuses. Avec elles, tout le monde savait les récitations. Il ne suffisait que de lire sur leurs
lèvres.
Chers Patrick et Didier, où que vous soyez, sachez que vos camarades de
classe ne vous ont pas oubliés.